Saint Antoine l’abbaye, un village aux multiples facettes
Je suis arrivée à Saint-Antoine l’abbaye par la D52 en venant de Romans sur Isère. Après Saint Michel de Savasse, la route offre un paysage superbe avec une vue directe sur le Vercors et les vallons verdoyant de la Drôme des collines et le début de l’Isère. Puis, au détour d’un virage serré, panorama à 180° sur l’abbaye monumentale de Saint Antoine. Voilà pour le décor.
Une visite impromptue
Je suis venue à Saint-Antoine l’Abbaye pour faire un stage à l’Arche de Saint-Antoine. L’intitulé « Du je au nous » devait m’apprendre les outils de gouvernance coopérative et partagée d’un groupe. Après une première soirée de démarrage de la formation et une nuit passée dans l’hostellerie de la communauté de l’Arche, j’ai décidé de partir. Cela ne correspondait pas à mes attentes. Pour être honnête, je m’y suis sentie assez mal à l’aise. Me voilà donc repartie prématurément et assez tôt le lendemain matin. Une belle occasion de flâner quelques heures dans ce village étonnant où tout tourne autour de la monumentale abbaye de Saint-Antoine l’Égyptien…
Un village carte postale…
Petite rue sinueuse grimpant jusqu’au parking d’herbe derrière l’office de tourisme, passage devant le bouquiniste, plusieurs restaurants, un artisan de bijoux en métaux, un atelier de cuir et liège, un ébéniste, un tailleur de pierres, une potière, une boulangerie et sa petite terrasse ombragée par une glycine magnifique… Une vie artisanale réelle. Un décor de carte postale. En surface. Si l’on gratte un peu ?
Une abbaye presque millénaire
Construite du XIIe au XVe siècle, l’abbatiale fut construite sous l’impulsion des Antonins, un ordre hospitalier de moines médecins qui rayonna sur toute l’Europe pendant le Moyen Age, autour des reliques d’Antoine l’Egyptien. Celui-ci est né vers 251 dans la vallée du Nil, dans une famille chrétienne d’Egypte. L’abbatiale est classée Monument historique par Prosper Mérimée en 1840. Monumentale par sa taille, elle regorge d’œuvres telles que des tapisseries d’Aubusson, des décorations murales en bel état, un orgue du XVIIe imposant et les reliques de Saint-Antoine. Un temps de pause méditative bienvenue en cette heure matinale… avant une visite du village.
Un village multiple
Trois univers se côtoient à Saint- Antoine l’abbaye. Le monde des commerçants et artisans, pour la plupart non natifs du village, venus ici par coup de cœur ou par les hasards de la vie. Les natifs, anciens du village, pour la majorité agriculteurs et fils d’agriculteurs. Et les habitants de l’Arche, communauté d’une cinquantaine de personne cohabitant selon les règles de l’holacratie* et vivant dans une partie de l’ancien monastère (l’autre partie est occupée par le musée départemental – que je n’ai pu visiter. A découvrir impérativement une prochaine fois ! Comment ces trois univers cohabitent ?
L’holacratie (ou holocratie qui semble étymologiquement plus correcte) est un mode de prise de décision et de gouvernance fondé sur la mise en œuvre de l’intelligence collective qui permet à une structure de s’auto-organiser comme une entité vivante. Chacune des parties prenantes participe à l’organisation sans faire appel à une hiérarchie ou à un organigramme traditionnel.
Une cohabitation courtoise
Cela m’a intriguée. Après quelques échanges avec des commerçants et des habitants, j’en ai déduit que s’est mis en place une sorte de respect distancié où les trois univers se côtoient sans vraiment se mélanger. J’aurais aimé avoir plus de temps pour rencontrer la maire du village et lui poser la bonne dizaine de questions que j’avais à fleur de lèvres ! Une autre fois peut-être… Ce qui n’a rien gâté de ma visite où j’ai pu apprécier l’accueil chaleureux de l’office de tourisme qui m’a abreuvée d’informations et de quelques commerçants ravis de parler de leur métier.
Eric, l’incontournable bouquiniste
Impossible de manquer la bouquinerie de Saint-Antoine. Passage obligé lorsque l’on s’aventure en voiture jusqu’au parking en haut du village. J’ai d’ailleurs cru m’être perdue… Alors j’ai demandé mon chemin. La discussion s’est engagée avec sympathie.
Ouverte depuis 1997, la bouquinerie de L’archiviste est une caverne d’Ali baba pour les dénicheurs de vieux bouquins. Laissez-moi y une semaine entière et je n’en aurai pas fait le tour ! Le propriétaire a débarqué à Saint-Antoine par hasard. Il y est resté par amour. Depuis, il glane des livres ici et là qu’il empile sur ces rayonnages prêts à craquer… Et si d’aventure la librairie est fermée lorsque vous passez, c’est qu’Eric est en train d’animer des ateliers de calligraphie et d’imprimerie à côté de son manège à manivelle quelque part en France… Et ne cherchez pas son site internet ou pire, une page facebook ! Il n’en a pas…
Chloé, une maroquinière passionnée
Un peu plus haut dans le village, les effluves de cuir ont alerté mes narines et réveillé des souvenirs d’enfance à cirer les selles et filets de chevaux… Je me suis laissée happer. La boutique Cuir de Lune est un antre aux couleurs douces et aux odeurs merveilleuses… Derrière son comptoir, concentrée, une maroquinière souriante, Chloé.
« Ce sac est trop étroit », explique-t-elle devant mon regard intrigué. « Il ressemble à une besace de plombier… Je dois revoir le patron pour l’agrandir. » Chloé dessine, découpe, assemble, coud devant ses clients. Une boutique-atelier comme je les aime, vraie, simple, sincère. Arrivé à Saint-Antoine « un peu par hasard », elle s’y est installée et développe sa boutique et son métier avec passion. Autodidacte, Chloé a appris le métier en faisant. Le résultat est honorable ! Une jolie collection de sacs à main, ceintures et bijoux à prix abordables. On en redemande !
D’autres artisans font vivre le village. Le tailleur de pierre a suscité ma curiosité. Malheureusement absent lorsque j’ai jeté un œil dans ses ateliers… Une autre bonne raison de revenir à Saint-Antoine l’abbaye !
Et alentours ?
A voir, à faire autour de Saint Antoine l’Abbaye Ne ratez pas une visite de Romans sur Isère et de son incroyable et unique musée de la chaussure (à lire ici) Et le palais du facteur cheval à Hauterive, devenu célèbre - pour les non drômois - depuis le film de Nils Tavernier « L’incroyable histoire du facteur cheval »